J’ai toujours pensé que la pauvreté c’était l’équivalent d’être sans abris, d’avoir un gobelet avec des mitaines trouées en jouant de la cuillère dans le métro. J’ai toujours pensé que j’étais assez loin de tout ça et que je n’aurais jamais à craindre de manquer de quoi que ce soi. J’avais la conviction qu’en étant allé dans un collège privé je ne connaitrais jamais l’ombre de la pauvreté voir même un reflet de son visage.
Dans notre société c’est facile de juger les gens, de croire que si une personne n’arrive pas dans son budget c’est simplement qu’elle ne calcule pas bien, qu’elle ne met pas les priorités aux bons endroits. Mais j’ai appris avec une famille qu’il y a presque toujours un évènement pour faire une jambette à mon budget. Une jambette ça peut être une voiture qui brise (tadam arrivé ce matin), les frais de modulation des garderies, une perte d’emploi, un enfant malade, une dépression, le décès d’une personne que l’on aime profondément ou toutes ces réponses en même temps. Tristement, avec la vie que nous menons, même si un événement difficile arrive, c’est comme si nous devions tout faire machinalement pour éviter le déclin financier. L’expression ‘’Show must go on’’ prend tout son sens, c’est comme si tout tenait à un fil et qu’il faut continuer de regarder loin pour tout maintenir en équilibre.
Dernièrement, suite à ma lettre à Philippe Couillard, une fille sur le web m’a répondu que je n’aurais pas du avoir d’enfants
avant d’avoir une stabilité financière, au début ça m’a fait de la peine mais après coup, j’ai réalisé que cette fille jugeait avant de me connaitre et de connaitre les autres… J’aurais aimé dire à cette fille que personne n’est à l’abri d’une jambette de la vie. J’aurais aimé lui présenter ma grande amie du secondaire Julie Vallières qui passe du sourire aux larmes avec sa petite Lylia-Carole depuis deux ans et demi. C’est si difficile de gérer le stress d’avoir un enfant malade et la trouille de ne pas avoir assez de sous pour stationner la voiture à l’hôpital. De tout faire pour se battre contre une tumeur au cerveau, un cancer de la moelle osseuse et un drôle de système de santé tout en faisant des démarches auprès des organismes pour pouvoir finir le mois un peu moins essoufflé (mais toujours très essoufflé quand même). Même avec la meilleure stabilité financière un amoureux qui a un bon emploi, financièrement c’est difficile, voir quasi impossible d’arriver.
J’aurais aussi aimé lui présenter ces mamans monoparentales qui étaient convaincues d’avoir trouver le prince-charmant et qui après les enfants, ont vécu l’infidélité ou pire encore, des agressions physiques ou psychologiques. Au lieu de cracher sur ses femmes, j’ai pensé les applaudir de se tenir debout, de se respecter comme personne et de se donner le droit d’être heureuse. Ces femmes ne sont pas du genre à se plaindre mais quand toi tu écris ce type de commentaire c’est certain que pour elle c’est comme un couteau dans le coeur parce que c’est comme de donner une raison au malheur, de dire : « Ben tu l’as cherché» au lieu de dire «Je suis avec toi».
Parfois je trouve ça dommage de voir des insultes venant des gens qui aiment ouvertement dire que ce n’est pas leur problème qu’un enfant soit malade ou qu’une femme recherche des services pour de l’aide, qu’il ne devrait pas avoir à payer pour »c’te monde-là ». Les médias sociaux ça met souvent le spot light sur les caves, sur les gens qui ne réalisent pas que la maladie ou une jambette financière c’est souvent comme la loterie. Je me considère chanceuse à tous les matins de me lever avec deux petits bonhommes en santé et un papa extraordinaire, ce n’est pas parce que j’ai été plus fine ou plus smatt qu’une autre, ça s’appelle juste de la chance. Je considère que si la petite fille de mon amie Julie a une tumeur au cerveau j’accepte avec le sourire et les yeux dans l’eau de payer collectivement pour ses services pour espérer qu’un jour, elle puisse dire tourlou à ces maudites métastases. Des fois, je pense que ces personnes méchantes devraient se faire greffer un coeur dans la tête, ce serait pratique dans le monde dans lequel nous vivons.
Un jour, j’ai décidé d’arrêter de juger les gens au premier coup d’oeil, ce matin-là, j’ai décidé de m’asseoir et de tenter de mieux comprendre l’autre. Je sais, parfois c’est difficile parce que le regard rapide est plus facile que la compréhension. Je ne suis pas une sainte, parfois, parce que je suis trop fatigué j’ai la jugeote un peu spontanée mais je tente très fort de me mettre dans les chaussettes de l’autre. Ce n’est pas parce que tout va comme sur des roulettes aujourd’hui et maintenant qu’il en sera toujours ainsi et l’inverse est tout autant valable. Les enjeux financiers font partis de notre quotidien peu importe d’où nous partons et vers où nous allons. À un cheveu de la trentaine, je m’ennuie de la naïveté que j’avais quand j’étais petite et que je réussissais à amasser 100 $ à ma fête avec les cartes des matantes, j’avais l’impression que ‘’the sky is the limit !’’. Aujourd’hui, je sais qu’avec ce même billet de 100$, j’en ai juste assez pour remplir la voiture d’essence et aller chercher des trucs pour les lunchs de demain. Je l’avoue c’est beaucoup moins excitant qu’un vélo neuf avec une belle clochette qui fait ding ! ding ! pour mon beau guidon étoilé !
Sur ce : Tournée de coeur dans la tête pour tout le monde !
Je t’aime mon amie tu es une maman extraordinaire xxx
Nadia says
10 juin 2015 at 9 h 49 minTellement vrai ! Je confirme que avant d avoir des enfants, j avais des diplômes en poche, un poste enviable – beaucoup d appelés et peu d’élus – j étais stable monétairement. J’avais trouvé mon prince aussi MAIS nous avons eu une enfant avec une maladie génétique et autiste … C est beau avoir une formation en administration mais quand qui a pu d argent qui entre, difficile d administré.
J ai de la chance mon prince est resté donc »on s en sort » MAIS rien à voir avec ma vie d’avant … donc »installé » ou pas on ne sait JAMAIS ce que la vie nous réserve …
Emilie says
10 juin 2015 at 9 h 58 minComme toujours avec toi de superbes textes… Maintenant j’envoi une pensée à tous les parents dont leur enfant est malade car il faut effectivement beaucoup de courage !
Claire Coicou says
10 juin 2015 at 10 h 03 minQue dire de plus que…Wowww… Un magnifique texte, rempli d’émotions… rempli de VRAI… rempli d’amour. Dans ce monde ou l’on vit… tu amène ta petite touche d’amour… tu amène ce petit baume sur mon coeur qui me prouve qu’il reste des gens vrais… des gens qui ont a coeur le bonheur des autres. Merci d’être là! D’être qui tu es et de changer le monde ta façon! Merci! – Ti coeur rempli d’amour ce matin!
tania says
10 juin 2015 at 10 h 19 min« Se faire greffer un coeur dans la tete » wowwwww ça s’applique dont bien à tout pleins de situations…. merci!!! Une maman en pleine jambette en ce moment 😉
Christine says
10 juin 2015 at 10 h 24 minJe souhaite beaucoup de courage à ton amie. Car nous aussi nous avons eu une jambette financière il y a 6 ans. L’été passé nous avons eu nos première vacances. 1 semaine en Gaspésie. Tout le monde nous disais hein??? Vous alliez pas en vacances? Ben non… quand t’a deux beaux enfants et que tu donnes naissances à une merveille bien malade tu dis au doc sauvez la…. on fera avec le reste. Alors on prend un sans solde après le congé de maternité, quand on plus une cenne on retourne travailler avec le coeur ben gros parce que le doc comprend pas que t’a pu une cenne, on gratte les fond de tiroir pour payer le gaz, les médicaments, le stationnement, le resto (et on mange ce qu’il y a de moins cher) Alors oui… il faut expliquer au deux plus vieux qu’ils ne porteront pas des marques, il n’irons pas en vacances, qu’on va seulement au resto quand on a vraiment pas le choix… Après 6 ans de bataille… ma ptite Kalyna va bien… Le système est gratuit…. mais avoir un enfant malade… disons que c’est une jambette financière que j’échangerais pas pour tout l’or du monde.
Myreille Proulx says
10 juin 2015 at 11 h 15 minAMEN! Je suis tombé enceinte de mon premier fils pendant mes études au cégep. Jusque là ça allait, on s’est marié, on a acheté une maison et j’ai tout misé sur mon fils qui était gravement asthmatique et qui m’a fait passer des semaines et des semaines à l’hopital pendant 3ans. C’est vrai que ça coûte cher être dans l’imprévu tout le temps. J’ai arrêté mes études parce que ça devenait invivable et même chose pour mon travail à temps partiel. J’étais seule pour m’occuper de lui avant-pendant et après les crises. Je peux vous dire que j’en ai mangé en titi des cannes de sardines et des ramens pendant les séjours à l’hopital. Chaque fois que fiston présentait des signes de tirage je remplissais mon pack-sac avec ce que j’avais dans le garde-manger parce que je savais que j’en avais pour au moins 4-5jours à luncher sur mon bras. À l’hopital les soins sont gratuits mais tout ce qui entoure l’hospitalisation ça coute un bras et une jambe 😉 Quand ça arrive on cherche des trucs pour économiser, on sépare-coupe et recoupe dans à peu près tout, cable, internet, épicerie, téléphone, vacances, garderie, on sort à minuit pour déplacer la voiture pour sauver du parking, ya rien qu’on fait pas pour garder la face et ne pas avoir à quêter des sous et de perdre la face. Aujoud’hui on s’en ai bien sorti et je connais la chanson. Quand quelqu’un de mon entourage est hospitalisé et que je peux me le permettre, je leur cuisine de petits plats à réchauffer ou leur apporte des paniers de collations. Je ne leur paye pas leur bil de parking ou leur facture de médicaments mais je sais que ça sert et que ça dépanne selon la situation.
Jessica says
10 juin 2015 at 11 h 31 minMerci pour ce beau texte ! Je suis une jeune maman de bientôt deux petit garçon (un de deux ans et un autre en route ) ! J’ai donc aimer <> ! J’ai été une belle jambette financière pour ma mère quand j’étais plus jeune… On m’a diagnostiquée 2 maladies chroniques et une maladie de sang … je peux vous dire que le jugement des autres sur la situation financière de la famille me fessait mal au cœur! Ma mère a décider de ne pas travailler pour m’accompagner a mes rdv , hospitalisation (sois dit en passant j’ai jamais dormit une nuit seule à l’hôpital même pas rendu à 12-13 ans ) ! Pis ma mère bien je la remercie et je comprend tellement ce qu’elle as fait maintenant que je suis maman 🙂
Annie says
10 juin 2015 at 13 h 01 minTrès touchant ce texte. Je suis bien d’accord avec ce que tu as écrit 🙂
Melanie says
10 juin 2015 at 13 h 47 minj’aime le bout ou tu dis tu penses avoir marier le prince charmant et tout à coup tout bouscule…
<3 merci
Genevieve says
10 juin 2015 at 15 h 17 minJe suis chanceuse d’avoir un chum génial mais je sais que ce n’est pas le cas pour tout le monde…
Marie-Christine says
10 juin 2015 at 14 h 29 minJ’adore ton texte, parce qu’il est vrai, remplie d’humilité, de reconnaissance et de compréhension… Le regard des autres sur nos vies ne devrait pas nous atteindre… qui de mieux que nous-même pour nous juger!!! 😉 Je crois que certaines personnes doivent VIVRE de ces situations pour comprendre. Je ne souhaite à personne de vivre de tels expériences cependant si nous pouvons en tirer quelque chose c’est bien la sympathie, le respect et la nécessité de s’entraider… Nous ne pourrons jamais savoir ce que l’autre vie mais nous pouvons ouvrir notre coeur à celui-ci et si le besoin est là il saisira l’opportunité… Le jugement est souvent plus pénible à vivre que les contraintes elles-mêmes… Si vous ne connaissez pas, ne parlez pas et si vous savez, sympathisez, simplement… Merci pour ce beau texte… sincèrement
Karine says
10 juin 2015 at 18 h 32 minOuf. Je me sens tellement incluse présentement. J’ai fait des choix de carrière que je croyais excellent qui aujour’hui me font réaliser qu’il ne l’était pas. Prendre un travaille à temps partiel pour avoir un pied dans la place et me rendre compte qu’il n’y a aucune possiblilité de faire plus d’heure. De prendre un deuxième travaille avec 4 enfants, parce que oui ça coûte cher des enfants et même si ils ne sont pas malades. Même avec un amoureux qui gagne très bien NOTRE vie parce que je considère que c’est vraiment grâce à lui si nous avons cette belle maison, l piscine et tout….mais la lourdeur que ça implique pour lui. Je me sens continuellement coupable de ce choix. Et les gens de l’extérieur qui se permettent de dire: on sait Ben lui il fait de l’argent…. Et bien si il savait que cet homme merveilleux ne s’achète pas rien….niet. Moi non plus. Pas que je me plaigne mais de se faire juger sans cesse nous….me fait mal. Oui on rush….quand même!!! Mais nos filles ne manquent de rien….JAMAIS. Tu fais du bien. Merci.
Yolande bolduc says
10 juin 2015 at 19 h 00 minChère Julie,
C’est avec un amour inconditionnel et un homme de coeur que tu réussi à traverser cette épreuve car moi mon fils lorsqu’il était tout petit il fesais de l’asthme et des convulsions je devais coucher a l’hôpital ste-justine pour qu’il puisse recevoir des soins adequoitement j’en ai passé des nuit d’inquiétude et mes deux filles était à la maison avec leur Papa qui était autant inquiet que moi pour notre fils des 4mois suis était sous la tente d’oxygène, je comprend l’angoisse que tu a dans ton intérieur tu est une grande honorable femme même si tu as eu une jambette financière comme dans la plus pars des gens mais une chose est certaine c’est que tu as le coeur a la bonne place
Même dans la tête….. Alors courage ma belle que Dieu vous protège !
Marie says
11 juin 2015 at 20 h 07 minComme je me dis souvent, on est à 2-3 badlucks de la rue.
Pour avoir eu des amis qui l’ont été, et avoir entendu leur histoire, je le sais maintenant.
Et ceux qui chialent de payer pour « ces gens-là », que ça soit le chômage, congé maternité, congé maladie, ou aides financières de toutes sortes de la part du gouvernement… ils ne peuvent pas prédire que ça ne sera jamais leur tour!
Par exemple, ma mère un jour s’est plainte de devoir cotiser au RQAP sur sa paye alors qu’elle n’en profitera jamais, qu’elle n’a pas eu droit à un congé payé quand elle m’a eue (elle était à son compte, donc même pas d’assurance-emploi).
Je lui dit que moi je cotisais au RRQ et peut-être que je n’y aurai jamais droit! (à mon âge, ma retraite est loin, j’ai même pas encore fini mes études!) Fair enough. 😉
Je reçois présentement de l’aide des prêts et bourses, j’ai eu besoin de plusieurs soins de santé dans les dernières années (mon système immunitaire me lâche constamment!), mais je me dis que plus tard, je vais payer pas mal d’impôts et de taxes, car ces aides m’auront permis de compléter mes études et avoir un bon métier, je vois ça comme du donnant-donnant!